Sommaire
L’adoption massive des CBDC risque encore de s’accélérer à l’approche de l’été
Jacques Attali l’a dit, une grave crise financière devrait intervenir au plus tard à l’été 2023.
Dans un contexte d’inflation galopante et de contraction monétaire orchestrée par les grandes banques centrales, il est donc assez probable de voir l’instauration des CBDC se matérialiser encore un peu plus dans cette conjoncture économique et financière mondiale morose.
D’ailleurs, malgré le narratif médiatique actuel et la restructuration de 2 grands blocs (OTAN vs BRICS), le cataclysme financier ultime qui vient dans les prochains mois (horizon 2025) va concerner l’ensemble des nations du monde.
La raison est simple : la colossale montagne de dette mondiale et les bulles sous-jacentes ont contaminé l’entièreté des économies de la planète. Et même la potentielle première économie et atelier du monde, la Chine, va être fortement impactée.
N’oublions pas qu’en 2022, le FMI estimait la dette cachée de la Chine à 8300 milliards soit 48% du PIB chinois. Tandis que Goldman Sachs a évalué cette dette cachée à 23 000 milliards selon un article de Bloomberg.
Et même si les géants de Wall Street et la City sont en train d’opérer à une réorientation des flux d’investissement vers la Chine, car pour l’instant l’économie la plus productive, le cataclysme financier touchera bien le tigre de papier.
C’est donc dans ce contexte que le Fonds Monétaire International a communiqué, il y a quelques semaines sur le lancement de sa propre monnaie numérique (programmable) à destination des États membres via le Digital Currency Monetary Authority, un certain Unicoin.
Mais cette tendance d’adoption massive et les communications importantes autour des CBDC risquent encore de s’accélérer à l’approche de l’été.
L’inflation, la crise de la dette (épisode du plafond de la dette américaine), la fin de l’accalmie sur les matières premières, etc. vont à coup sûr permettre aux banquiers centraux de présenter et d’imposer cet outil de domination ultime comme panacée à tous les problèmes.
Néanmoins, même si ce phénomène est mondial, car orchestré par la Banque des Règlements Internationaux de Bâle, il existe des différences notables dans les stratégies et dans la temporalité concernant l’adoption de ces nouvelles monnaies 3.0 (structurées sur la base de la Blockchain).
Selon la Banque des Règlements Internationaux (BRI), plus de 85 % du total des banques centrales dans le monde ont déjà indiqué travailler ou avoir l’intention de travailler à court terme sur un projet de monnaie numérique.
En cette fin de printemps 2023 et avant peut-être un grand évènement de sidération, il semble donc important d’effectuer une synthèse et une compilation des informations sur l’avancement des grands projets de CBDC à travers le monde.
Tour d’horizon : Les BRICS
Commençons d’abord par nous intéresser aux États membres des BRICS, pour comprendre que la mise en place de cet outil au service du Nouvel Ordre Mondial, concerne tout le monde.

Le point sur la Russie
L’exemple russe mérite d’être étudié en premier.
Ainsi, depuis 2018, la banque centrale avance sur un projet de rouble numérique et a lancé dès 2019 des tests avec des banques nationales. L’objectif initial était de contourner les infrastructures internationales, notamment le réseau sécurisé Swift (qui s’est depuis tiré une balle dans le pied avec les sanctions américaines et occidentales de 2022 relatives au conflit Russo-Ukrainien).
En avril 2021, six mois après une première lettre consultative auprès du secteur financier local, l’autorité monétaire russe avait annoncé travailler sur un prototype de « rouble numérique », appartenant à la famille des monnaies numériques de banques centrales.
L’année suivante en 2022, le gouvernement russe a continué à déclarer que sa monnaie numérique de banque centrale (CBDC) pourrait être émise avant la fin de 2023.
Selon le média Lenta.ru :
« 19 banques russes travaillent actuellement avec la Banque centrale sur la dernière phase de test du rouble numérique. »
Dans le contexte de guerre contre le bloc transatlantique, Moscou veut accélérer le déploiement de sa CBDC dans le but de substituer l’utilisation du dollar américain dans ses transactions internationales.
D’ailleurs, c’est le ministre des Finances, Anton Siluanov, qui avait déclaré que le rouble numérique serait « mis en circulation avant la fin de 2023« .
Néanmoins les modalités du déploiement n’ont pas été dévoilées. Et à l’heure actuelle, il n’existe pas d’information précise sur un éventuel déploiement sur l’ensemble du territoire national ou en plusieurs étapes, à la manière chinoise.
Dans ses déclarations, Siluanov semblait confiant sur la capacité de l’institution monétaire russe à parvenir à mener à bien cette mission :
« La Banque centrale a déjà lancé un pilote cette année. Et d’ici la fin de l’année, après l’adoption de la législation pertinente, elle mettra en circulation le rouble numérique. Il a également expliqué que le rouble numérique deviendrait un outil « transparent et fiable » permettant aux utilisateurs « de suivre toutes les transactions et de surveiller les dépenses ». Mais prioritairement il semble que le rouble numérique soit « utilisé pour les règlements transfrontaliers ». Cette démarche s’inclut dans un processus qui « exclurait l’ingérence de parties hostiles dans les transactions avec des partenaires », a affirmé le ministre.
Suite à la déconnexion de la Russie de SWIFT, celle-ci a connu des perturbations au niveau de ses transactions commerciales à la suite des sanctions imposées par les États-Unis et l’UE. Une telle justification parait donc logique.
Siluanov a ensuite souligné le caractère bilatéral de ce nouveau système de paiement :
« La [CBDC] est un système de paiement dépourvu de toute restriction. Deux États peuvent l’utiliser pour négocier et réaliser leurs propres estimations. Et aucun autre pays ne peut intervenir ou geler ces estimations. »
En réalité, les politiciens et les économistes russes, comme Serguey Glaziev membre du Conseil financier national de la Banque de Russie, ont évoqué plusieurs fois, depuis 2008, la dédollarisation nécessaire de leur économie dans les années à venir.
Et il semblerait que l’élaboration du rouble numérique en tant que système de paiement, s’inscrive prioritairement dans cet objectif.
L’aspect « wholesale CBDC » (c’est-à-dire une CBDC de gros) apparaît plus concrètement dans le projet russe. Cependant le déploiement de son corolaire (retail CBDC) c’est-à-dire une monnaie numérique de détail n’est pas du tout exclu et est même envisagé comme on l’a constaté avec les déclarations de Siluanov.
Surtout que l’écosystème crypto est depuis plusieurs années assez fort et développé en Russie. Il a existé et existe encore sur le territoire des Tsars, un fort sentiment dans la nouvelle génération et dans une partie de la classe politique russe que les stablecoins soutenus par l’État et les monnaies numériques privées pourraient les aider à dédollariser leur économie.
D’ailleurs, des députés russes ont récemment déclaré qu’ils espéraient promulguer deux projets de loi favorables à l’écosystème crypto au cours du mois de juin.
Ces initiatives législatives consistent à permettre le minage de cryptomonnaies à l’échelle industrielle et l’utilisation limitée des cryptomonnaies comme outil de paiement dans le cadre des accords commerciaux internationaux.

Cependant la confiance dans ce Web3.0 des Russes pourrait finir par se retourner contre eux.
Et il est vraisemblable que la banque centrale de Russie choisisse, elle aussi, dans les mois à venir, de s’orienter clairement vers une CBDC complète (c’est-à-dire cumulant les critères de monnaies numériques de gros et de détail).
La Russie, étant de plus en plus proche de la Chine, il n’est pas certain qu’elle résiste longtemps à cette tentation de mise en place de cet outil de contrôle total des populations et des acteurs économiques. La logique de l’efficacité et de l’efficience en temps de guerre pourrait faire pencher la balance du mauvais côté…
D’ailleurs, il est à noter que la Biélorussie, pays allié de la Russie, va elle aussi lancer sa monnaie programmable avant la fin de l’année 2023 comme l’a annoncé le président de la banque centrale biélorusse Pavel Kallaur :
“Les paiements transfrontaliers représentent la technologie qui nous intéresse le plus” […] “Si d’autres pays mettent en place des monnaies numériques, nous devons être prêts à connecter notre système pour offrir un niveau de service élevé à nos citoyens et entreprises”.
La Douma d’État russe serait donc sur le point d’adopter la loi sur le « rouble numérique » d’ici juin, permettant potentiellement à la Banque centrale de Russie de lancer des tests en direct de sa monnaie numérique de la Banque centrale.
Le point sur l’Inde
Examinons maintenant le cas de l’Inde, autre puissance montante voisine de la Chine, où la roupie numérique en 2023 est déjà en phase de test sur le terrain, dans quatre villes de ce pays-continent.
En effet, comme le stipule le narratif officiel de l’écosystème crypto, la Reserve Bank of India (RBI) s’est, elle aussi, heurtée aux trop grands intérêts économiques et technologiques apportés par Bitcoin et les actifs numériques. La banque centrale indienne n’a cependant pas pu faire interdire les cryptomonnaies.
Mais l’institution indienne se rattrape en avançant rapidement sur son propre projet de monnaie programmable.
La banque centrale indienne a annoncé le lancement du premier test pilote de sa roupie numérique le 1er décembre 2022.

Les essais de cette MNBC sont donc actuellement testés par un groupe fermé d’utilisateurs composéde clients et commerçants) sur un territoire limité à quatre grandes villes : Mumbai (Bombay), New Delhi, Bengalore et Bhubaneswar. Ces expérimentations vont ensuite être élargies à neuf autres villes indiennes.
Concernant les banques commerciales, huit participent à l’expérimentation, mais la phase initiale a débuté avec quatre banques : la State Bank of India, la ICICI Bank, la Yes Bank et la IDFC First Bank. À la différence de la communication russe, création, distribution et utilisation pour des paiements au détail sont les objectifs affichés de cette roupie numérique.
D’ailleurs, l’Inde s’est associée aux Émirats arabes unis pour développer sa CBDC.
Le point sur l’Arabie Saoudite
Restons donc dans la péninsule arabique pour évoquer le cas de l’Arabie Saoudite. En effet, la puissance pétrolière qui ne fait pas encore partie des BRICS semble cependant chercher de nouvelles alliances. Et dans ce contexte de redéfinition de la géopolitique internationale, Riyad a aussi lancé le développement d’une CBDC.
L’hégémonie du pétrodollar étant déclinante, la banque centrale saoudienne (SAMA) a accéléré ses recherches sur les monnaies numériques de banque centrale, mais n’a cependant pas encore annoncé de lancement officiel.
Dans un message publié le 23 janvier 2023, elle a expliqué qu’elle travaillait sur une phase d’un projet qui « se focalise sur les cas d’utilisation de la CBDC dans le commerce interentreprises national en collaboration avec les banques locales et les fintechs ».
Cependant comme les ¾ des banques centrales qui communiquent sur les projets de CBDC, le royaume dirigé par Mohamed Ben Salman a indiqué qu’il n’y avait pas eu de décision finale concernant le lancement d’une telle monnaie numérique.
« L’institution monétaire saoudienne souligne que, bien qu’aucune décision n’ait été prise concernant l’introduction de la CBDC dans le Royaume, elle continue de se concentrer sur la recherche des avantages et des risques potentiels de la mise en œuvre de cette monnaie. »
Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, qui consiste à réduire la dépendance du Royaume à l’égard du pétrole, à diversifier son économie et à développer les secteurs des services publics tels que la santé, l’éducation, les infrastructures, les loisirs et le tourisme.
Selon Fahad Almubarak, gouverneur de la SAMA, les banques locales et les sociétés de paiement seront fortement impliquées dans le projet et la mise en œuvre d’une CBDC.
Cette déclaration de l’Arabie Saoudite est intéressante, car le pays a complètement enclenché la tendance CBDC, mais les Saoudiens adoptent la même stratégie (de communication) que la Russie, à savoir la réflexion prioritaire d’une adoption d’une CBDC de gros (contre la logique de la CBDC de détail).
D’ailleurs, cette stratégie de communication (Wholesale CBDC/ Retail CBDC) a été menée par toutes les banques centrales (à part la Chine).
Ce débat sur l’utilité d’une CBDC pour les usages/ paiements au sein des populations ou seulement entre les gros acteurs (États, multinationales, paiements internationaux) est présent dans l’ensemble de la littérature présentée par les banques centrales.
Cette fausse opposition, ou plutôt ce choix vicié, vise à faire croire aux populations que les banquiers centraux hésitent sur la nature de l’outil à adopter. Alors qu’en vérité la monnaie numérique de banque centrale dite « de gros » n’est que la première étape de la mise en place des CBDC.
Ce narratif vise simplement à faire croire aux masses qu’il existe un débat et que rien n’est sûr. Alors que la mise en place des CBDC s’est considérablement accélérée depuis la proclamation du Great Reset au cours de l’année 2020, ce chapitre du Grand Récit consiste à faire croire que « ça se discute ».
Mais en cette année 2023, comme l’a démontré la réunion annuelle du Forum Économique mondial à Davos en janvier 2023, la pression « réinitialisatrice » de l’économie mondiale est encore montée d’un cran.

Le point sur l’Afrique
Passons maintenant à un autre membre important des BRCIS : la nation arc-en-ciel.
C’est donc en 2018 que l’Afrique du Sud par l’intermédiaire de la South African Reserve Bank (SARB) a lancé un projet pour tester l’utilisation de la technologie du grand livre distribué (DLT) dans le règlement des paiements interbancaires.
Cette initiative dénommée Project Khokha, a connu une seconde phase qui a permis de finaliser la preuve de concept technique (PoC) du projet. Cela constitue une première phase de lancement d’une CBDC sud-africaine.
D’un point de vue technique, la DLT de la banque centrale sud-africaine a permis « aux parties prenantes » de tester l’émission de titres de créance et d’activer deux options de paiement pour le règlement. Il s’agit notamment d’une monnaie numérique de banque centrale (wCBDC) et d’un token (wToken) pour les règlements interbancaires.
À la suite de la phase deux du projet Khokha, la Banque de Réserve de l’Afrique du Sud teste désormais une CBDC « de gros », réservée aux transferts interbancaires réalisés par des institutions financières.
Notons également que le pays de Nelson Mandela et Desmond Tutu participe également à un projet pilote transnational avec les banques centrales d’Australie, de Malaisie et de Singapour…
D’ailleurs pour avoir une vision plus globale de la tendance monnaie numérique programmable en Afrique, je vous conseille cet article « Africa CBDC » du Fonds Monétaire International, qui dresse une brève synthèse de la situation en Afrique noire (Ghana, Zambie, Kenya, Ouganda, etc.).
Rappelons-le, tout de même, après les Bahamas, c’est le Nigéria (avec son eNaira) qui est le deuxième pays du monde à avoir émis une monnaie numérique de banque centrale complète depuis le début de l’année 2023.

Le Nigéria a depuis connu quelques heurts en cette première partie de l’année 2023, suite à l’adoption de son fameux eNaira, mais la situation semble s’être apaisée depuis quelques semaines…
Le point sur le Brésil
Pour ce qui est de la première puissance économique d’Amérique latine, le Brésil, l’actuel président Lula Da Silva semble vouloir poursuivre ce que l’ancienne administration Bolsonaro avait déjà commencé.
Le projet « Digital Real » initié en 2020 a été conforté par Lula et aujourd’hui, ce même projet a franchi un cap historique. En effet, la CBDC du Brésil a réussi avec succès le test de la blockchain Stellar.

D’ailleurs la firme américaine Visa participe activement au développement d’une CBDC alimentée par la blockchain au Brésil.
La banque centrale brésilienne a affirmé que le real numérique a été conçu pour aider les entreprises nationales à se développer, tout en cherchant à renforcer les réglementations entourant les cryptomonnaies.
Quand on vous dit que le même narratif est présent partout…
Dans un entretien au journal O Globo du 27 février 2023, Roberto Campos Neto, le gouverneur de la banque, a ainsi confirmé que la phase pilote du real numérique était prête à être lancée :
« Notre idée est de mettre en place et de faire fonctionner quelque chose au plus tard en 2024. »
Le point sur l’Argentine
D’ailleurs, en Amérique latine (dans un contexte de crise des monnaies fiat liées aux dettes et à l’hyperinflation), les grandes firmes transnationales de Wall Street utilisent complètement l’écosystème crypto pour construire le monde d’Après 3.0 comme en témoigne le fait que Binance collabore avec Mastercard pour le lancement d’une seconde carte crypto au Brésil qui est prépayée et qui permettra aux clients d’effectuer des achats quotidiens avec des cryptomonnaies.
De plus, pour ce qui est des CBDC, le grand rival sud-américain, l’Argentine n’est pas en reste comme en témoigne la littérature de la BRI et les déclarations du gouvernement argentin de 2022 qui expliquait qu’il travaillait à mettre en place une monnaie numérique nationale pour répondre au contexte actuel.
Cependant, il est vrai que, dans les faits, l’Argentine est l’un des grands pays qui est le plus en retard dans cette tendance.
Le point sur la Chine
Enfin pour clôturer cette partie sur les pays qui ne font pas partie de l’axe transatlantique, nous pouvons brièvement analyser le cas de la Chine.

Tout d’abord, il faut le dire, en matière de CBDC, la Chine est le modèle et le pays le plus avancé dans le développement de cette technologie et des secteurs qui lui sont liés.
L’expérience du Yuan numérique et le crédit social en cours d’élaboration dans l’empire du Milieu, sont les objectifs finaux du Stakholder Capitalism promu par Davos.
Malgré l’opposition actuelle, que l’on nous présente dans le cadre du narratif de la guerre et la redéfinition de l’ « ordre marchand planétaire » cher à notre Jacques Attali anational, il est clair que la Chine présente tou
Découvrez aussi ces sujets
KRACH MONDIAL ? LE FIASCO DE l’EURO (2/4)
KRACH MONDIAL ? LE FIASCO DE l’EURO (1/4)
VERS LA FIN DE BRETTON WOODS ET DE L’HÉGÉMONIE DU DOLLAR ?
LES CRYPTOMONNAIES : UNE RUPTURE GÉOÉCONOMIQUE MONDIALE ?
LE POINT SUR LE BREXIT
À QUAND L’ÉCLATEMENT DE LA PROCHAINE BULLE MONDIALE ?